Total veut devenir un producteur d’électricité
Source : Les Echos. 18/03 | 18:10 | mis à jour le 19/03 à 09:35 | Par Anne FEITZ EXCLUSIF – Le PDG de Total, Patrick Pouyanné, a dévoilé les ambitions du groupe à horizon 2035. Il a aussi annoncé le départ de Philippe Boisseau, directeur général de la branche Marketing & Services.
Total ne veut plus se contenter d’être un grand groupe pétrolier. Il veut aussi devenir un électricien. Selon nos informations, lors de la présentation de son projet pour le groupe à vint ans, baptisé « One Total », mercredi 16 mars devant les cadres dirigeants, le PDG Patrick Pouyanné a annoncé une inflexion majeure de la stratégie à long terme : il veut à terme aussi devenir un acteur majeur de l’électricité, présent dans la distribution, le trading, mais aussi la production.
Total est pour l’instant quasiment absent de cette activité. Le groupe possède des intérêts minoritaires dans plusieurs centrales à gaz, à Abu Dhabi, au Nigeria et en Thaïlande. Dans les énergies renouvelables, il détient une participation de 57,5 % de la société américaine Sunpower, l’un des leaders mondiaux de la fabrication de panneaux solaires, qui construit aussi des centrales. Il possède également 20 % d’une grande ferme solaire à concentration à Abu Dhabi (Shams). Au total, les énergies vertes n’ont toutefois généré que 108 millions de dollars de résultat net opérationnel ajusté en 2015, soit, moins de 1 % du total dégagé par le groupe.
Une réflexion sur l’éolienMais Patrick Pouyanné a inscrit les énergies nouvelles, et en particulier le solaire, parmi ses grands axes stratégiques, prévoyant d’y consacrer une enveloppe d’investissement de 500 millions de dollars par an. « Je pense que le renouvelable, à l’horizon de 15 ans, fera au moins 10 à 15% du portefeuille de Total », avait-il déclaré lors d’une audition à l’Assemblée nationale en juillet dernier. Dans sa vision à 2035, il a porté cet objectif à 20 %. Outre le solaire, Total mise aussi sur les biocarburants et la biomasse. Et Patrick Pouyanné a annoncé mercredi son intention de lancer une réflexion sur l’éolien. « Il a en revanche totalement exclu le nucléaire », indique un participant à la réunion.
Total avait aussi annoncé en septembre 2015 son intention de vendre de l’électricité aux entreprises en France, via sa filiale Total Energy Gaz, qui commercialise déjà du gaz aux consommateurs finaux. Une activité que le groupe exerce déjà en Allemagne et au Royaume-Uni.
Selon nos informations, l’électricité sera placée au sein d’une branche nouvellement créée, qui comprendra aussi le gaz et les énergies nouvelles. « C’est une résurrection de l’ancienne branche Gas & Power… », note un ancien du groupe. Cette nouvelle branche s’ajouterait aux trois branches actuelles, l’exploration-production, le raffinage-pétrochimie, et le marketing & services, où étaient jusque-là logées les énergies renouvelables – et qui s’apprête à changer de patron (lire ci-dessous). Le discours prononcé mardi par Patrick Pouyanné devrait être largement diffusé en interne le 24 mars.
Ex-rival de Patrick Pouyanné, Philippe Boisseau quitte le groupe Dans le cadre d’un séminaire réunissant les hauts dirigeants du groupe, Philippe Boisseau, directeur général en charge de la branche Marketing & Services et directeur de l’activité Energies Nouvelles, a annoncé son départ. Candidat à la succession de Christophe de Margerie à la tête du groupe, il avait vu le Conseil d’administration lui préférer Patrick Pouyanné après l’accident de l’ancien PDG, en octobre 2014. « Ce n’est pas trahir de grands secrets que de dire que l’entente entre les deux rivaux n’était pas la meilleure », dit un bon connaisseur du groupe. Depuis dix-huit mois, cette rivalité n’avait cependant pas empêché les deux hommes de travailler ensemble et les activités dirigées par cet X-Mines de cinquante-trois ans affichent de bons résultats à l’heure ou la baisse des cours du pétrole frappe tous les groupes pétrolier. Entré chez Total en 1995, il avait intégré le Comex en 2012. Il devrait quitter le groupe mi-avril.
Par Hacina Zegzeg sur Bastamag - 17 mars 2016
Il y a un peu plus d'un an, une mobilisation populaire gagnait In Salah, au cœur du Sahara algérien, pour s'opposer à l'exploitation des gaz de schiste, prônée par le gouvernement.
Alors que la compagnie pétrolière publique Sonatrach vient de suspendre ses forages, Hacina Zegzeg, l'une des leaders du mouvement social, revient sur ce mouvement inédit.
« L'eau est l'élément vital de notre vie dans le désert. In Salah a pris en main son destin. Le nouveau concept est « Smart Sahara ». Il est simple : maraîchage, énergie solaire, développement durable. »
Parmi les nombreux communiqués de soutien, porteurs d'espoir et décuplant notre détermination, que nous avons reçus, il en est un qui a particulièrement attiré mon attention. Il émanait d'une dizaine d'associations citoyennes des pays du Maghreb.
Ce jour-là, je me suis dit que la lutte contre les fracturations hydrauliques ne concernait pas que l'Algérie, car ce communiqué portait une mention particulière qui disait : « la fracturation hydraulique risque de mettre en danger l'avenir de l'eau de toute une région d'Afrique. »
Vous imaginez à quelle vitesse je me suis ruée sur les atlas, sur Internet, et je découvrais que nous avions en commun avec d'autres pays du Maghreb cette nappe d'eau appelée SASS : système aquifère du Sahara septentrional. Cet aquifère que partage l'Algérie, la Tunisie et la Libye, s'étend sur un million de km2 et comprend deux nappes immenses, le Continental Intercalaire et le Complexe Terminal. Je savais par ailleurs que l'exploitation de l'eau par les forages réalisés jusque là avait été tellement importante parce qu'anarchique qu'elle avait engendré la disparition de l'Artésianisme, provoquant par la même le tarissement des exutoires.
Ni santé, ni formation, ni éducation, ni agriculture
Nous possédons cette gestion ancestrale de la parcimonie de l'eau.
Les mensonges successifs et les diverses manipulations de l'État devenaient de plus en plus nombreux, fréquents.
Les citoyens servent de cobaye à la toute puissance des entreprises gazières
In Salah a pris en main son destin
Lire l'article de Hacina Zegzeg sur Bastamag
Depuis 1992, l’Union européenne (UE) a mis en place les indications géographiques (IG). L’UE dispose de trois systèmes pour encadrer les produits agricoles et les denrées alimentaires de qualité . AOP (appellation d’origine protégée), IGP (indication géographique protégée) et STG (spécialité traditionnelle garantie). Pour les AOP, la transformation et l’élaboration ont lieu dans une aire géographique déterminée avec un savoir-faire reconnu, constaté et dûment inscrit dans un cahier des charges.
L’IGP est plus souple. Dans la zone géographique considérée se déroulent au moins la production, la transformation ou l’élaboration du produit.
Les discussions internationales, au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), ont abouti dès 1994 à l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (Adpic). Mais le texte ne satisfait personne et, surtout, permet une interprétation différente selon que l’on est ressortissant nord-américain ou européen.
En France et, par extension, en Europe, l’IG est fondée sur une propriété publique, l’Etat étant « nu-propriétaire » et les ayants droit – les acteurs d’une filière, qu’ils soient vignerons, producteurs de fromage ou de jambon – n’en sont que des «usufruitiers ». Les pays d’Amérique du Nord n’ont pas du tout cette conception. Seule la marque privée dont l’entreprise est propriétaire est reconnue et protégée. Le statut de propriété publique d’une AOP ou d’une IGP n’a donc aucun sens pour eux.
Il y a actuellement quelque 1477 IG enregistrées dans l’UE. L’Italie en est le pays le mieux pourvu avec 269 produits alimentaires (fromages, jambons, huiles…) et 523 vins. La France en compte également plus de 600 (dont les deux tiers pour des vins) : Brie, Roquefort, Camembert, Champagne…
Des AOC/AOP (appellations d’origine contrôlée ou protégée) aux STG (spécialités traditionnelles garanties) en passant par les labels rouges, la France compte 215 dénominations enregistrées au niveau européen, hors vins et spiritueux. Ces signes officiels de qualité ont une grande…. lire la suite en cliquant ICI
PME indépendante basée à Forbach en Lorraine, La Française de l’Energie veut réaliser une levée de fonds de plusieurs dizaines de millions d’euros sur la Bourse de Paris pour extraire et commercialiser le gaz contenu dans le charbon des anciens bassins miniers français. Objectif à terme : couvrir 5% consommation annuelle de la France.
La remontée des cours des actions ressuscite les projets d’introduction en Bourse enterrés depuis plusieurs mois. Première société à vouloir profiter de cette fenêtre de tir, La Française de l’Energie, qui souhaite donner une nouvelle vie aux anciens bassins houillers français en exploitant le gaz contenu dans le charbon, plus connu sous le nom de grisou.
Jouer la carte du gaz made in France« Faire du neuf avec du vieux », Julien Moulin, président de la PME installée à Forbach, en Lorraine, l’assume totalement. Il affiche l’ambition de « remplacer une partie des importations françaises » avec l’objectif « à terme de couvrir 5% de la consommation annuelle » de gaz en France. Les réserves de gaz, certifiées par le BEICIP-Franlab (filiale d’IFP Energies Nouvelles, l’ancien Institut Français du Pétrole) représentent l’équivalent de près de 6 fois la quantité consommée chaque année dans l’Hexagone, et « une fois et demie » le gisement de Lacq, situé dans le Béarn.
Outre cette relocalisation partielle de la production d’énergie fossile, Julien Moulin revendique un gaz plus propre. L’empreinte environnementale de la production et de l’acheminement du gaz de houille de La Française de l’Energie est estimée à 3,4 grammes de CO2 par kilowatt-heure (kWh), soit un bilan carbone près de dix fois plus performant que celui du gaz importé (32 g de CO2 / kWh). « Nous n’avons pas besoin de traiter, de transférer ni de liquéfier notre gaz », spécifie le dirigeant.
Excédents de trésorerie à partir de 2020D’ici quelques années, l’exploitation a vocation à être rentable « dans toutes les configurations de marché » grâce à la combinaison d’un combustible à haut pouvoir calorifique (96% de méthane dans le gaz de charbon contre 93% pour le gaz d’importation) et d’une proximité avec les infrastructures existantes, les sites de production du groupe se situant entre 200 mètres et 5 km des points de distribution ou des pipelines.
Julien Moulin vise une génération d’excédents de trésorerie à partir de 2020. Une configuration qui devrait permettre « d’envisager » la mise en place d’une politique de distribution de dividendes.
Lourds investissementsLa société a l’intention de couvrir « par l’introduction en Bourse tous ses besoins de financement », qui sont évalués à plus de 61 millions d’euros pour l’exercice fiscal 2016/2017. 20 millions d’euros doivent être consacrés après la cotation à l’acquisition de Gazonor, qui produit déjà du gaz de mine au sein de trois unités situées en région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, bientôt rebaptisée Hauts-de-France. Déjà exploité entre 2009 et 2011 par la société, Gazonor va être redynamisé par le lancement d’une activité de conversion du gaz en électricité, moyennant une enveloppe de 9,8 millions d’euros.
En Lorraine, La Française de l’Energie espère mettre en service sa première plateforme de production « au second semestre 2017 » et compter 15 puits de production en activité d’ici à fin 2018. D’autres projets sont à l’étude en France, en Belgique et en Allemagne pour continuer à faire croître la taille des réserves. Julien Moulin aspire à « redonner un élan aux territoires concernés en leur fournissant une énergie locale et compétitive ».
Gaz de charbon et gaz de mine ≠ gaz de schisteLe gaz de charbon (CBM), le gaz de mine (CMM) et le gaz de schiste appartiennent tous à la famille des gaz non conventionnels. Mais, précise La Française de l’Energie dans son document de base d’introduction en Bourse, l’extraction des CBM et CMM en France « n’exige pas de recourir à la fracturation hydraulique [technique très critiquée pour son impact environnemental] du fait des caractéristiques géophysiques du charbon, des réservoirs et des bassins miniers ».
Le 16 mars 2016 par Valéry Laramée de Tannenberg
La Camorra se recycle dans les décharges illégales.
En plein développement, la traite illicite de la nature est plus lucrative et moins risquée que les activités illégales traditionnelles, rappelait un colloque organisé mardi 15 mars par Thomson-Reuters. Les Etats et les entreprises tardent à lutter contre cette criminalité. Un laxisme auquel commence à répondre organisations internationales et certains pays.
«Low risks, hight profits», telle est la devise environnementale des mafias. Policiers, magistrats, associatifs le disent, le crime environnemental paie de plus en plus. Les estimations varient du tout au tout, mais les chiffres agités par les experts sidèrent. «Après la drogue, le trafic d’être humains et d’armes, c’est la 4e source de revenus du crime organisé», estime le préfet André Viau, président d’honneur du forum international des technologies et de la sécurité. En 2014, un rapport du programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue) et d’Interpol avait chiffré entre 70 et 213 milliards de dollars (entre 63,2 et 192,3 Md€) le chiffre d’affaires annuel des activités illégales et nocives à l’environnement[1]. Des chiffres qu’il faut sûrement revoir à la hausse.
Contourner les normes
Les demandes en ressources naturelles et en espèces rares ne faiblissent pas. Le durcissement des normes environnementales, dans les pays développés et émergents, incite un nombre croissant d’entreprises à se débarrasser de leurs déchets, par exemple, dans un lointain pays ou au fond de la Méditerranée. «Pour avoir refusé de payer 400.000 € pour traiter ses déchets à Amsterdam, la société Trafigura a causé pour 150 millions de dégâts environnementaux et sanitaires en Côte d’Ivoire», résume l’avocate spécialisée Françoise Labrousse.
Plus respectables, d’autres compagnies sont néanmoins prêtes à tout pour accéder au meilleur prix à des métaux rares qui entrent dans la fabrication de téléphones mobiles ou d’éoliennes. La multiplication des guerres civiles et des conflits asymétriques ‘obligent’ guérillas et mouvements terroristes à se payer en nature, en trafiquant l’ivoire, les pierres ou le bois précieux. Enfin, les peines encourues sont moindres que celles qui répriment le trafic de cocaïne ou la prostitution.
Une lutte inégale
L’exploitation illégale de la nature se développe d’autant plus facilement qu’elle est encore peu combattue. Dans certains pays d’Afrique démunis, ce sont des ONG environnementales qui forment, équipent et paient les rangers chargés de la lutte contre le braconnage. Un combat souvent inégal. «Chaque année, une centaine de gardes sont tués par les braconniers, dont les moyens se sont militarisés», rappelle Céline Sissler-Bienvenu, directrice France et Afrique francophone de l’International fund for animal welfare (Ifaw).
Interpol sans le sou
Dans les pays riches, non plus, la criminalité verte n’est pas au cœur des préoccupations sécuritaires. Et la montée du risque terroriste n’est pas seule responsable. Face aux grands groupes, les Etats rechignent de plus en plus souvent à montrer les dents, concède Gilles Hennequin, conseiller auprès du délégué interministériel à l’intelligence économique. Les grands argentiers préfèrent investir l’argent public ailleurs. «Faute de financement, Interpol a dû interrompre son projet Eden de lutte contre les déversements illégaux et le trafic international de déchets», se désole Henri Fournel.
D’une plate-forme à l’autre
Les programmes en cours mobilisent peu de monde. Pour coordonner la lutte contre le braconnage en Afrique, le gendarme détaché à l’organisation internationale dispose de 7 personnes. C’est peu pour un continent. Mais la situation n’est guère plus favorable à Paris. «Vous n’imaginez pas le temps qui s’est écoulé entre le moment où nous avons suspecté les fraudes à la TVA sur les échanges de quotas d’émissions de CO2 et les premières mesures», soupire un enquêteur. Les lourdeurs administratives ne sont pas seules responsables. L’adaptabilité des criminels est parfois difficile à suivre. «Nous avons sensibilisé les responsables d’E-bay au fait que de nombreux trafiquants d’animaux utilisaient leur plate-forme pour développer leur commerce. Ils ont pris des mesures efficaces et le nombre d’annonces a chuté, explique Céline Sissler-Bienvenu. Par la suite, ces vendeurs sont allés proposer leurs services sur d’autres sites moins regardants.»
Perdu d’avance?
Le combat est-il perdu d’avance? Sûrement, si les Etats et les acteurs économiques continuent de considérer la criminalité environnementale au même plan que la protection de l’environnement. Négligeable. Certains, comme Jean-Baptiste Carpentier, misent beaucoup sur la prise en compte par les entrepreneurs de principes véhiculés par la responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE). «Bien sûr, c’est compliqué de maîtriser totalement sa chaine d’approvisionnement, concède le délégué interministériel à l’intelligence économique. C’est un peu comme la lutte contre la corruption. Il y a quelques années, les banques estimaient ne pas pouvoir tracer les flux financiers. Quelques milliards d’amendes plus tard, elles ont trouvé les moyens de le faire.»
Le droit s’adapte
En attendant l’entrée en vigueur du préjudice écologique, des juristes appellent à se servir plus efficacement du droit existant. «La cour de cassation a consacré le droit pour un entrepreneur vertueux d’attaquer pour concurrence déloyale un concurrent ignorant le droit et les normes», rappelle le professeur de droit Laurent Neyret.
Souvent sous la poussée des ONG, le droit s’adapte, lentement mais sûrement. Initialement dédiée à la lutte contre la criminalité classique, la convention de Palerme pourrait être prochainement un peu verdie. Dans les prochaines semaines, le gouvernement français devrait publier un projet de loi sur la transparence économique et la lutte contre la corruption. Baptisé loi Sapin II, ce texte réprimera plus sévèrement la corruption et assurera, souligne Bercy, une meilleure protection des lanceurs d’alerte, souvent à l’origine de la publicité de scandales environnementaux. Selon certaines sources, le texte pourrait être élargi au respect des conformités environnementales.
[1] Abattage des arbres, braconnage, trafic d’espèces protégées, pêcheries, activités minières, décharges.