Monsieur Stéphane Le Foll
Ministre de l’Agriculture,
de l’Agroalimentaire et de la forêt
78, rue de Varenne
75349 PARIS SP 07
Rochefort, le 13 février 2017
Objet : Consultation publique relative au projet de décret autorisant les fouilles et les travaux miniers dans les forêts de protection
Monsieur le Ministre,
Avec ce nouveau projet de décret, le gouvernement veut mettre fin à l’interdiction des fouilles archéologiques et extractions de matériaux en forêts de protection par l’instauration d’un régime « spécial » dérogatoire pour autoriser ces activités.
Il s’agit donc une nouvelle fois d’une régression environnementale, en contradiction avec les engagements du gouvernement lors des assises de simplification du droit de l’environnement.
Dans le droit actuel (R 141-30 du code forestier), le classement d’un massif forestier comme « forêt de protection » rend impossible certains travaux à l’exception de la recherche d’eau. Le projet actuellement en consultation vise, sur la base de l’article L141-4 du code forestier à ajouter un régime spécial d’autorisation pour les fouilles et extractions de minerais à l’instar de ce qui est prévu pour l’eau. Une nouvelle brèche dans le statut de protection de ces habitats naturels que sont les forêts.
Ce texte en consultation est censé garantir que ces travaux, en principe, ne compromettent pas la protection/conservation de ces boisements.
Pour la LPO, les « garde-fous » en l’état du texte sont insuffisants et flous. Le fait de ne pas « modifier la destination forestière du site » ou d’énoncer que les travaux ne « doivent pas nuire à la conservation de l’écosystème forestier ou à la stabilité des sols dans le périmètre de protection » sont des notions vagues et sujettes à l’interprétation subjective de l’autorité décisionnaire et à fortiori du demandeur …. Ces expressions n’ont pas de fondement technique ou scientifique.
D’autre part, ne sont pas prévus d’analyse des impacts ou incidences sur la faune et la flore et l’habitat, ni de mesures de compensation spécifiques, forcément plus importantes en forêt de protection au regard de l’intérêt écologique particulier qu’elles peuvent présenter. En résumé, aucune mesure d’évaluation-réduction-compensation n’est exigée clairement par le texte. De même pas de précision sur l’information et la consultation du public…
En outre, on ne sait pas si la remise en état à l’issue de l’exploitation permettra un retour « à l’identique » de la forêt de protection sur le plan écologique (mêmes essences forestières ? même densité ? qualité du sol ?).
Si on peut convenir d’un intérêt général pour le captage de l’eau ou des fouilles « archéologiques », l’exploitation de mines et carrières, y compris souterraines (au regard de l’emprise de tels travaux, de la nécessité de voies d’accès des engins, etc.) relèveraient de ce niveau et nuirait à la conservation d’une forêt de protection. Ce type d’opérations exige un encadrement plus strict.
Enfin, sur la justification du projet, la LPO est très circonspecte. En effet, la présentation du projet de décret ne précise pas que l’article L. 141-1 du code forestier dresse la liste des raisons pouvant justifier ce classement en forêt de protection :
« 1° Les bois et forêts dont la conservation est reconnue nécessaire au maintien des terres sur les montagnes et sur les pentes, à la défense contre les avalanches, les érosions et les envahissements des eaux et des sables ;
2° Les bois et forêts situés à la périphérie des grandes agglomérations ;
3° Les bois et forêts situés dans les zones où leur maintien s’impose soit pour des raisons écologiques, soit pour le bien-être de la population. »
Sur le site internet de la consultation, on peut lire que l’unique – et obscure – raison de ce projet de texte. Ainsi, selon le ministère de l’agriculture, ce décret viserait à :
« Créer une base juridique pour traiter certaines situations actuellement rencontrées dans les forêts périurbaines, objet de nombreuses attentes sociales mais dont le classement en forêt de protection ne peut être prononcé à ce jour, faute de l’existence d’un régime spécial permettant de réaliser des travaux de fouilles archéologiques ou d’extraction de matériau au sein du massif classé »
Pour seule justification de son projet de décret, le ministère de l’agriculture prétend donc aujourd’hui que certaines forêts « situées en périphérie des grandes agglomérations » et qui devraient être classées, ne le seraient pas pour la seule raison que ce classement entrainerait l’interdiction d’y mener des fouilles archéologiques ou d’y exploiter des mines. Il faudrait donc permettre l’exploitation des mines dans ces forêts pour mieux les protéger (sic)
L’argument tient d’autant moins que, en 2011, les forêts classées pour des raisons tenant à leur proximité avec des grandes agglomérations représentaient 20% des forêts de protection. Le soi-disant obstacle ne fait donc pas vraiment peur…
Or, ce décret ne s’appliquerait pas uniquement aux forêts de protection périurbaines, mais également à celles classées à d’autres titres, tels que des raisons écologiques ou de défense contre l’érosion. 80% des forêts déjà classées le sont pour des raisons tenant à la protection de la montagne, des dunes ou d’autres raisons écologiques…
Aussi et surtout, ce qu’omet de dire le ministère dans la présentation du projet de décret, c’est que ce texte ouvrirait la voie à l’exploitation minière dans les forêts de protections existantes, alors que celles-ci n’ont pas rencontré le soi-disant obstacle à leur classement invoqué dans la présentation du projet de texte, lié à l’impossibilité d’y exploiter des mines.
Pour toutes ces forêts déjà classées, ce serait un net retour en arrière de leur statut juridique protecteur.
Et ce d’autant que parmi les forêts de protection déjà classées, si certaines bénéficient d’autres régimes de protection (Natura 2000, APPB) telle que la forêt de la Coubre en Charente-Maritime, pour d’autres, la forêt de protection est le seul régime juridique protecteur.
Autant les fouilles archéologiques pourraient être acceptées, à condition d’être encadrées et d’impact très modeste, avec des mesures compensatoires proportionnées, autant l’extraction de minéraux dans les forêts de protection doit rester proscrite.
Espérant que vous intégrerez nos remarques à la prochaine réglementation, je vous prie d’agréer, Monsieur le Ministre, mes salutations respectueuses.
Yves VERILHAC
Directeur Général LPO France
Tél. : 05.46.82.12.34
Fonderies Royales – CS 90263
17305 Rochefort CEDEX
https://www.lpo.fr/
Quelques activistes du ANV (anti-violence) COP 21 ont mené hier après-midi une action, pour dénoncer «le passage en force du traité Ceta». Il s’agit d’un traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada, signé en octobre 2016, devant être ratifié par le Parlement européen le 15 février. «C’est un faux nez du Tafta, un accord qui devait être signé entre l’Europe et les Etats-Unis, et qui a finalement été dénoncé», expliquent ses détracteurs. «Le Ceta est une menace qui pèse sur toutes nos normes, en termes de pollution, de sécurité sanitaire, de sécurité au travail, etc. Il permettrait l’entrée des OGM, et serait la porte ouverte à des multinationales nord-américaines aux pratiques sans foi ni loi, à l’image de McDonald’s qui attaque la ville de Florence en Italie parce que la mairie refuse d’ouvrir un restaurant sur un site très touristique.»
Pour manifester leur opposition au traité Ceta, les militants ont donc hier après-midi installé une grande banderole sur le toit du McDonald’s de la place du Pin à Agen. A 16 h 30, après être montés sur le toit du fast-food, ils ont plaqué une grande bâche (sous le regard des policiers), invitant trois députés européens de la région Nouvelle Aquitaine à se positionner sur le vote du 15 février à Strasbourg. «Les eurodéputés de gauche ont déclaré clairement qu’ils voteraient contre, indiquaient les militants. Mais trois parlementaires doivent se prononcer. Qu’allez-vous faire, Michèle Alliot-Marie, Robert Rochefort et Franck Proust ?»
Le restaurant a continué à accueillir ses clients comme si de rien n’était, ces derniers étant peu sensibles aux messages crachés par le haut-parleur des militants.