Enquête du 22/03/2015 par Justine Brabant
Au Royaume-Uni, le Guardian vient de lancer une campagne d'envergure sur le changement climatique. Sa première bataille : mettre un frein à l'extraction de combustibles fossiles, en incitant les investisseurs à désinvestir de ce secteur. Pétition, articles accusateurs, campagnes très visuelles sur son site : le quotidien britannique ne fait pas les choses à moitié. Une petite révolution, dans une presse qui a adopté depuis les années 1990 une approche dépolitisée des questions environnementales.
Alan Rusbridger a soixante-deux ans, et un regret. Après avoir occupé pendant vingt ans le poste de rédacteur en chef du Guardian, cette figure du journalisme britannique a publié, le 6 mars, un billet en forme d'introspection. À quelques mois de la retraite, il s'est demandé s'il allait "avoir des regrets". Rusbridger n'en dénombre qu'un : n'avoir pas bien traité "l'immense, imposante, écrasante question" de "comment le changement climatique va probablement causer d'incalculables dégâts et tensions à notre espèce, du vivant de nos enfants."
À ses équipes et à ses lecteurs, il explique que le changement climatique n'est rien moins que "la plus importante histoire du monde". Mais c'est une histoire que "le journalisme n'a jamais réussi à raconter". Car le temps long des bouleversements environnementaux cadre souvent mal avec le temps court de l'agenda médiatique : parfois, des "choses extraordinaires et importantes se passent, mais se déroulent trop lentement ou trop invisiblement pour le tic-tac impatient des rédactions, ou pour attraper l'attention d'un lecteur épuisé en route vers son travail", note Rusbridger. Résultat : une couverture médiatique souvent limitée à la recension de catastrophes, et des lecteurs "découragés et désengagés". Lire la suite